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Miguel M A New Day
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A New Day, le nouvel
album de Miguel M, est un enivrant cocktail de blues, de funk et de soul music. Auteur compositeur
interprète, il ballade l'auditeur dans un univers marqué par ses influences
musicales noire-américaines, à travers ses propres compositions et covers
originales revisitées de manière très personnelle.
Ce chanteur
guitariste, dont la voix grave et profonde est en pleine harmonie avec
son jeu
de guitare tranchant, est également une bête de scène, espace privilégié
où il
exprime sa passion, son plaisir du show et du partage. À chaque concert,
il fait, avec son band, un véritable carton !
Virus
de Blues a invité Miguel M à participer à son émission de radio éponyme, à
l'occasion de la sortie nationale de A New Day. Morceaux choisis.
Miguel, ton nouvel album
s'intitule A New Day. Faut-il y lire un message ?
Un message ou plusieurs.
J'ai choisi ce titre, "un nouveau jour", parce que je sentais que j’étais en
train de passer à une autre étape dans ma vie d’homme et d’artiste. J'espère que
ce sera également un nouveau jour dans le milieu du blues, qu'il nous ouvrira
davantage ses portes et que l’on n’entendra plus : "Ah c'est trop rock, trop
funk, trop…" Voilà des propos que j'aimerais ne plus entendre, parce qu'à mon
sens, ils ne veulent absolument rien dire. Aujourd'hui, tellement de styles
différents se mélangent. Alors allons-y. Allons-y !
C'est un disque très intime.
Oui. Je me raconte en
parlant de mes proches, d’amour, de mes rêves…
A New Day
a été signé par Last Call Records.
Quelques mots ?
Je suis content d'avoir
intéressé Last Call Records. Je ne m'y attendais pas. Ils on fait découvrir
Calvin Russell en France, travaillé avec Elliott Murphy, avec beaucoup
d'artistes qui ne sont pas classés "blues". Ils produisent toutes sortes de
musiques : du latino, du jazz, du rock… et donc aussi du blues.
Distribué en bacs par
Wagram. Ce qui n'est pas rien pour un jeune artiste français.
Là
aussi, ça été une bonne surprise. Ils sont très professionnels et se disent
satisfaits des ventes.
Dans le digipack, tu écris :
"J'ai été bercé par les musiques noire-américaines, j'ai été profondément
influencé par les grands bluesmen que sont B.B. King, Albert Collins et Buddy
Guy, mais je les admire trop pour leur ouvrir un musée". C'est bien le cas.
Je ne veux pas faire partie
de ceux qui font du blues une musique morte que l’on visite pour se rappeler le
bon vieux temps. Je joue une musique vivante qui ne s’adresse pas qu’aux
nostalgiques.
Il n'y a pas beaucoup de
chorus de guitare dans ce disque.
Non, c’était un choix
artistique.
Ils sont concis.
Oui.
Alors qu'en public, même si
tu te considères avant tout comme un chanteur, tu t'exprimes puissamment à la
guitare.
Je pense qu’on n’écoute pas
un CD comme on assiste à un concert. Les gens achètent des CD pour les écouter
tranquillement chez eux. Trois, quatre chorus, c'est long, même pour moi. En
concert, les chorus ont toute leur place, ils font partie du show, le public y
prend plaisir.
On entend dans Young Man
un son très marqué Albert Collins.
Oui, ce musicien m’a
beaucoup influencé. La chanson parle d’un homme qui se détruit peu à peu et
qui ne peut plus faire ce qui le passionne dans la vie. L’un de ses amis assiste
à cette descente, impuissant.
Spain
est un titre riche en émotions. Tu possèdes des racines Andalouses dont tu
sembles particulièrement fier.
Je suis surtout très fier de
mes parents. Leur histoire m’a inspiré Spain. Dans les années cinquante,
mon père a quitté l’Espagne franquiste pour trouver du boulot en France. Ma mère
ne l’a rejoint que deux ans plus tard avec quatre enfants. C’est l’histoire de
beaucoup d’immigrés qui sont venus d’Espagne, d’Italie, du Portugal, d’Algérie
ou d’ailleurs. Ils ont eu le courage de rompre avec tout ce qui faisait leur vie
depuis des générations pour donner de meilleures chances à leurs enfants.
Tes parents ont-ils toujours
su ou cru que tu deviendrais musicien ?
Ils ne sont pas surpris car déjà tout
petit, j’assurais une partie de la fiesta en chantant et en me trémoussant
devant ma famille qui encourageait "el nino". Plus tard, mes parents ne m’ont
pas empêché de suivre cette voie mais cela leur semblait impossible d’en faire
un vrai métier. Je sais qu’ils sont fiers de leur fils et à ce jour, ma mère
reste ma plus grande fan.
Dans My Father, tu
rends un hommage très prenant à ton père.
Oui, dans cette chanson, je
dis tout ce que je dois à mon père et combien il me marque encore aujourd’hui
dans ma vie d’homme. J’ai la chance d’avoir un père que j’admire car il a
toujours assumé ses choix, ses priorités même s’il a fallu en payer parfois le
prix. Toute sa vie a tourné autour de sa famille. Et c’est ce qui fait
qu’aujourd’hui encore, nous sommes une famille nombreuse et très unie.
Comment définirais-tu ta
musique ?
C’est une musique qui se
nourrit de ce que j'ai écouté et de ce que j’écoute: Tower Of Power,
Earth Wind And Fire, Bob Marley, Led Zeppelin, Queen, avant Saxon, Kiss, AC/DC…
mais aussi Prince, Sting, Ben Harper. J’aime leurs compositions, leurs
arrangements, leur son. Le son est très important, il donne ce côté moderne. Je
ne sais pas s'il faut donner une identité à ma musique...
Elle est très funk, avec
parfois quelques accents be-bop.
Funk avec un côté jazzy
forcément inspiré par Miles Davis. Un peu tout cela : jazz, funk, soul, et
blues. Le blues, toujours le blues.
Parlons de tes musiciens.
Le bassiste et le batteur se
connaissent depuis longtemps. Abder Benachour sort du lot des bassistes actuels,
plutôt slappe dans ce style. Pour le coup, il mériterait quelquefois d'en
mettre un petit coup ! Ce qu'il fait en concert. Patrick Machenaud est un
batteur qui a du métier. Quant à Fred Souche, je l’ai repéré sur les scènes
blues quand il était le guitariste des Bluesbreakers (trio défunt n'ayant
rien en commun avec John Mayall, ndlr). Il possède une palette très large
et, humainement, c'est un mec adorable. À l'orgue, le talentueux Yoan Dalgaard.
Je lui ai expliqué l'univers des morceaux et il m’a répondu simplement : "pas de
problème Miguel !" Il a suffi d’une prise! Un grand professionnel ! Les cuivres
sont un groupe dans le groupe. Ils travaillent vite et bien. C’est la première
fois que je travaille avec le trompettiste Stéphane Garaffi et j’aime beaucoup
l’ambiance qu’il a su créer dans My Father. J’ai eu aussi le plaisir de
jouer avec un vieux complice, Patrick Grimaud, aux percussions dans la chanson
A New Day. Un seul regret : j’aurais aimé travailler avec des chœurs.
Tu as invité un ami en guest,
Fred Chapellier.
Avec Fred Chapellier, nous
nous rejoignons professionnellement. Nous essayons de faire passer le même
message : le blues est partout qu'il soit funk, qu'il soit rock, qu'il soit… ce
qu'on veut : c'est du blues. Ce gars-là ne fait pas semblant, il a vraiment
l'âme. J'ai pris autant de plaisir à jouer sur son album, L'œil Du Blues,
qu'à l'inviter sur le mien. Et j’ai aimé chanter en français avec lui sur son
avant-dernier album.
Après quelques timides
prémices scéniques, as-tu complètement abandonné l'idée de chanter en français ?
Non, le problème est
d’écrire de bons textes en français et on sait combien on est exigeant pour
notre langue et combien il est difficile de la faire sonner.
Tu as cosigné l'ensemble des
lyrics du CD avec ta "petite femme", Ouacila.
Cela a été un long travail,
efficace et très agréable. Avec le même tempérament, plutôt peinard, nous avons
bossé tranquillement. Je mets beaucoup de temps à penser ma musique. Je la
cogite dans mon jardin quelques mois, je ne la joue pas. Une fois la mélodie
dans ma tête, alors je prends ma guitare. Puis, je travaille à structurer le
morceau, deux grilles chant, un refrain etc… je le fais écouter à "ma douce",
puis, nous discutons du thème, des émotions, du sujet qui colleraient le mieux.
Nous débattons et Ouacila s'attaque à l'écriture du texte.
Je trouve que ta voix s'est
étoffée au fil des ans. As-tu travaillé le chant ?
Au risque de paraître
prétentieux, non. Comme la guitare, je ne travaille pas le chant. J’apprends en
écoutant les autres et en jouant, en chantant. La scène est mon école.
A New Day
est mixé "à l'américaine".
Il pète !
C'était le but. On m'a
toujours classé comme un artiste rempli d'énergie. Dans les albums américains,
le mixage est souvent puissant. Ce mix était important. Nous avons donc placé
Bad Condition d'entrée, c’était une évidence. Pour Spain, je voulais
au contraire de la douceur. En revanche, sur We Will Rock You, il fallait
vraiment que ça tombe.
Comment t'es venue l'idée de
reprendre We Will Rock You, faut-il le préciser, de Queen ?
Lors d'un atelier de musique
dans un Lycée Professionnel de Chaumont, en Haute-Marne. Le projet était de
pratiquer le chant et les percussions avec une dizaine d’élèves. Certains
d'entre eux avaient envie de reprendre We Will Rock You. Je leur ai donc
proposé de créer notre propre version. Ce titre est tellement connu, il y a la
batterie d'emblée, on le fredonne, personne ne peut s'en décrocher. J'ai décidé
d'essayer de me l'approprier et j'ai cherché mon propre riff. La semaine
suivante, je l'ai interprété devant eux comme je le sentais et ils ont adhéré.
Nous avons travaillé ensemble sur ce titre et j'ai trouvé judicieux de
l'intégrer à l'album. Ils chantent avec moi sur le refrain. Ils ont ainsi fait
leur première expérience de studio accompagnés par leurs professeurs.
Autres reprises : I'm
Ready, de Willie Dixon. Encore un message ?
Pour ajouter encore de
l'optimisme à cet album. Et c’est bien vrai : I’m Ready !
Et Marley, Get Up Stand
Up, détourné, façon "club de jazz enfumé".
Même cas de figure que We
Will Rock You : repenser ce tube écouté des milliers de fois, avec le grand
plaisir de rendre hommage à Bob Marley, un immense artiste. Et puis, les paroles
sont d’actualité en France, non ?
Indiana Blues
est un morceau stylé
"Mississippi Cherokee" très personnel. Aimais-tu jouer aux cow-boys et aux
Indiens quand tu étais gamin ?
J'adorais. Comme beaucoup d’enfants marqués par les westerns, je préférais être
le cow-boy qui luttait contre les "méchants Indiens". Plus tard, j'ai compris
qu'ils voulaient simplement conserver leur terre et sauver leur culture.
Indiana Blues est un texte imagé où je prends plaisir à faire l'Indien.
Peut-on dire que le Miguel M
nouveau arrive là où on ne l'attendait pas ?
Je voulais surprendre et surtout partager des
émotions.
: Propos recueillis par JPS (photo : JPS)